Guerre HAMAS-ISRAEL

Après le 7 octobre

Aujourd’hui tout coeur juif est en deuil. Pour la première fois depuis un demi-siècle et pour la quatrième fois depuis la création de l’Etat d’Israël, celui-ci fait face à un risque existentiel. La barbarie inouïe s’est abattue sur notre peuple laissant derrière elle près de 1200 martyrs civils, enlevant deux cents cinquante otages[1] qui subissent des traitements atroces et dont la vie est également en danger, et faisant craindre des pertes du côté des militaires de Tsahal qui sacrifient leurs vies pour leur État, qui est le nôtre où que nous soyons.

La folie meurtrière du Hamas, du Jihad Islamique, du Hezbollah frappa sans discernement : les jeunes touristes, juifs ou non, du monde entier venus pour un festival techno. Les femmes et les enfants. Les jeunes et les vieux. Environ 10% de victimes appartenant à la communauté musulmane d’Israël ont également péri uniquement parce que citoyens israéliens ou se trouvant en terre d’Israël au moment de l’assaut. L’ampleur de la tragédie est de dimension biblique. Et le pire reste peut-être à venir. Cependant au moins deux autres démons, encore plus effarants que les monstres du Hamas, sont déjà à l’oeuvre, chacun à son échelle. Le premier qui est à la racine du mal – les États tiers qui ont réanimé avec minutie le projet de la destruction de l’Etat hébreu. L’Iran qui arme, entraîne et bénit les assassins de manière directe. La Russie qui les aurait financés indirectement, qui s’unit avec l’Iran, et dont l’invasion de l’Ukraine a détruit tout le système de sécurité internationale. La Chine, enfin, qui contemple la situation de loin, mais qui malgré des relations jusqu’alors plutôt constructives avec Israël, fait tout actuellement pour affaiblir l’Occident, et que le spectacle de la tragédie israélienne réjouit de ce fait. Et pour qui l’agression russe en Ukraine et iranienne en Israël ne sont que des préludes à l’avancement de son hégémonie propre – qui passe nécessairement par une occupation de Taïwan.

On dirait : quoi de plus simple – trois îles de liberté – Israël, l’Ukraine et le Taïwan se battent contre trois dictatures obscurantistes? Mais c’est là qu’apparaît le second démon qui sévit particulièrement en Occident. Celui qui, insidieusement, vicieusement et habilement,

instille dans l’opinion publique du « monde libre » des narratifs qui, sous couvert de pacifisme, déchargent les bourreaux et chargent les victimes. Les actes du Hamas

sont injustifiables ? Certes, mais n’oublions pas la colonisation ! Les morts, les blessés, les otages appellent à la compassion ? Certes, mais la riposte en a déjà causé autant et davantage de l’autre côté, et une vie n’en vaut -t-elle pas une autre ? Et le comble d’hypocrisie : Israël, ne bénéficie-t-il pas de notre soutien inconditionnel, tandis que les Palestiniens, ne sont-ils pas accusés de tous les maux ? Après un instant furtif d’empathie envers l’Etat hébreu, cette rhétorique fraye son chemin avec une célérité effarante.

Alors que devons-nous faire en tant que Juifs de France, avec ou sans passeport israélien, mais pour qui l’existence d’Israël reste synonyme de notre propre survie ? D’abord, aider Israël matériellement à la hauteur des moyens de tout un chacun. Et en choisissant une

source fiable pour la réception de nos dons afin d’être certains qu’ils servent la cause. Parler par tous les moyens possibles à nos proches restés en Israël, leur dire notre soutien, notre douleur, même notre impuissance, mais surtout ne pas garder le silence. Prier comme chacun sait faire, dans une langue qui lui est commode, pour la victoire d’Israël. Laisser de côté,

comme c’est le cas de tout le peuple d’Israël à l’heure où sont rédigées ces lignes, toutes nos divergences politiques : que l’on soit de droite ou de gauche, laïc ou religieux, progressiste ou conservateur, juif halakhique ou issu d’une famille mixte mais ayant fait son choix identitaire – nous demeurons Am Israël et Klal Israël.

Différer nos différends, oublier momentanément nos divergences. Prendre la parole publiquement pour ceux d’entre nous qui avons cette possibilité, afin de marteler à qui

veut l’entendre, qu’un discours postmoderniste laissant à chacun sa vérité, ne s’applique pas à la situation présente : c’est une « guerre juste » du Bien (par définition relatif) contre le Mal (par définition absolu). Qu’en défendant son droit d’exister, Israël se bat aussi pour le

monde libre et moderne contre l’ordre médiéval archaïque qui ne sait que semer la mort et la désolation.

Combattre les « belles âmes » qui, tombées dans ce que Pascal appelait « une illusion volontaire », cherchent à doter la barbarie d’un sens élevé, quand sa seule raison d’être est la destruction. Ne pas se leurrer sur nos ennemis. Mais ne pas oublier non plus ceux qui s’allient à nous à tous les niveaux et souvent de manière inattendue : depuis le Premier ministre indien Narendra Modi qui a pris position sans équivoque pour défendre Israël, jusqu’au chauffeur de bus bédouin qui a sauvé au péril de sa vie une trentaine de jeunes lors du carnage du festival Tribe of Nova. En passant par le blogueur arabe palestinien Nuséir Yassin, qui fort de ses 65 millions (!) d’ abonnés sur des réseaux sociaux a écrit le 8 octobre sur Twitter : « Aujourd’hui j’ai compris enfin que je n’avais qu’une maison, bien que je ne sois pas juif. Israël. C’est là où j’ai grandi. C’est un pays que je veux voir exister, pour je puisse exister […] Donc à partir d’aujourd’hui. Israélien d’abord. Palestinien ensuite ». Ce tweet (dont je n’ai cité que quelques phrases) a été vu par 8,5 millions de personnes, et il est à diffuser. Ces alliés nous sont précieux. Parce que c’est utile. Mais également parce que cela montre que l’intelligence du coeur existe partout et n’a ni couleur de peau, ni religion.

Rav Daniel Landes, rabbin orthodoxe israélien, fondateur du Centre Yashrut de Talmud Torah à Jérusalem publia le 10 octobre sur Times of Israel une lettre à ses étudiants. Il y énonce sept principes essentiels auquel le judaïsme nous astreindrait aujourd’hui. Neshama, Achrayut, HaTikva, Torateinu, Din, Rachamim, Sha-lom. Réconfort, Responsabilité, Espérance, Notre Torah, Jugement, Miséricorde, Paix. Nous nous devons de réconforter ceux qui en ont besoin. L’heure viendra où ceux qui par malveillance, incompétence ou négligence coupable répondront des carences qui ont permis la catastrophe. Mais pour l’instant l’essentiel c’est de s’unir, pour ensuite se questionner « Quelle fut ma responsabilité propre ? » avant tout réquisitoire adressé aux décideurs. L’espérance ne doit jamais nous abandonner, mais nous devons tout faire pour que celles et ceux qui, arme à la main, luttent contre l’ennemi soient aidés pour qu’elle soit exaucée.

Nous avons reçu la Torah et quel que soit notre degré de pratique cultuelle, consciemment ou non, c’est en elle que nous puisons notre identité. Quant à ceux qui nous assaillent, il convient d’arbitrer entre le jugement – sans appel ! – envers les criminels, et une miséricorde envers les innocents, même s’ils se trouvent de l’autre côté de la barrière, au propre comme au figuré. Enfin la paix – aujourd’hui plus utopique que jamais, reste l’idéal auquel la Torah nous appelle à aspirer. Pour l’atteindre il faut combattre et éradiquer ceux qui nous combattent et qui cherchent à nous éradiquer. Mais avec les autres, il nous faudra un jour trouver un mode de réconciliation. Que ces principes nous guident et nous éclairent à travers l’épreuve que nous traversons et celles qui nous attendent dans les jours et les semaines qui viennent.

עם ישראל חי

A.F.

[1] Il y a encore 130 otages détenus par le Hamas dont Kfir Bibas âgé de 9 mois le 7 Octobre et des personnes âgées de plu de 85 ans.

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *